Mort pour le France
Laurent Marie STÉPHANT (1881 / 1917)
Fils de François, marin-pêcheur, né à Groix en 1851 et de Marie Mélanie JÉGO, née en 1853, mariés à Groix, en juin 1877, résidant dans le village de Kervaillet,
Laurent Marie STEPHANT est né le 6 juillet 1881 à Groix, dans le village de Kervaillet. C'est le second enfant d'une fratrie de quatre.
Après quelques années passées sur le bancs de l'école, Laurent commence son apprentissage de marin en s'engageant comme mousse sur les dundées-thoniers de Groix vers l'âge de 12/13 ans. Il devient novice en lors de la saison de pêche de 1896. Il il est inscrit définitif sur le registre des gens de mer du quartier de Groix vers août 1899 sous le matricule n° 1549.
Laurent Marie STÉPHANT est levé le 21 octobre 1901 afin d'effectuer son service militaire au 3ème dépôt des équipages à Lorient, mais il est congédié le 24 novembre ayant été déclaré impropre au service à la mer, pour cause de myopie. Il est toutefois reconnu "utilisable" à terre par une décision du 20 novembre 1901.
Il reprend ses activités à la pêche
Laurent STÉPHANT se marie 30 mai 1911 avec une groisillonne, Marie Eugènie LANCO, née à Groix en juillet 1890, dans le village de Lomaria.
Après s'être installés à Ker Port Tudy; ls changent de résidence et vont se loger à La Rochelle, au 17 quai Valin. Ils auront deux enfants.
Laurent Marie STÉPHANT décède, disparu en mer, le 10 juillet 1917.
A la mobilisation, en août 1914, Laurent Marie STÉPHANT, est âgé de 33 ans. Inscrit maritime inactif, il est affecté à l'Armée de terre, au 2ème Régiment d'infanterie coloniale à Brest le 7 novembre 1914. Toutefois, il ne rejoint pas, et il reste inscrit maritime, matelot de 3ème cl. sans spécialité .
Quelques mois plus tard, il est rappelé par la Marine et il est affecté au "Jupiter I", un chalutier réquisitionné, comme chauffeur.
Le "Jupiter I " a été construit en 1912, mis à flot le 22 août 1913 et terminé en septembre par le chantier Duthie Torry situé à Aberdeen (Grande-Bretagne)
pour le compte de l’armateur Paul Gufflet, de La Rochelle (Charente-Maritime) port d'attache La Rochelle. Il est d'une jauge
brute de 263 tx.
Le patrouilleur auxiliaire "Jupiter I" fut administrativement considéré comme bâtiment armé en guerre ;
– du 2 au 27 août 1914 ;
– du 14 mai 1915 au 10 juillet 1917, jour de sa perte.
sister’s ships du Jupiter I (construite à Aberdenn par le même chantier à la même époque )
Le 10 juillet 1917, le patrouilleur " Jupiter I " saute sur une mine posée par le sous-marin UB 12 (OL Ernst Steindorff) devant Calais au barrage 398. Le navire coule dans les mêmes parages que le patrouilleur "Elisabeth" le 13 mai précédent. Son commandant, le maître de manœuvre Le Boulicaut, disparaît avec la moitié de son équipage. Le dragueur Lorientais, qui le suivait, commandé par l’EV Bouygue, n’hésite pas, malgré les risques qu’il court lui-même, à pénétrer dans le champ de mines pour recueillir les survivants: sans doute, le commandant exposait son navire à la rencontre d’une autre mine qui l’eût évidemment détruit, lui aussi, mais dit l’Amiral Ronarc’h :
"Il y a là un cas de conscience si délicat pour un marin, que l’on ne peut qu’approuver l’enseigne Bouygue d’avoir obéi à l’entrainement de son caractère généreux et entreprenant."
Le " Jupiter I " a sombré au point 50.59.05N, 01.46.55E >>>
Le bâtiment a été cité à l’ordre du jour dans la zone des armées du Nord
extrait du J.O. du 19 octobre 1919
Sur le patrouilleur "Richelieu", chalutier également réquisitionné à La Rochelle,
on aperçoit clairement l'armement
Laurent Marie STÉPHANT est l'un des onze marins tués dans l'explosion sur une mine du "Jupiter I " le 10 juillet 1917, en fin de matinée, au large de Calais (Pas-de-Calais).
Certains corps sont remontés à la surface et ont été récupérès, mais celui de Laurent ne réapparut jamais. Disparu, il fallut un jugement déclaratif prononcé par le tribunal de Cherbourg le 20 novembre 1917 pour acté son décès. Il était âgé de de 36 ans depuis 4 jours. Il laissait une veuve de 27 ans et deux jeunes orphelins.
Le jugement du tribunal fut transcrit sur les registres d'état-civil de la commune de Cherbourg à la date du 28 novembre 1917.
Mort pour la France, le nom de Laurent Marie STÉPHANT est gravé sur les monuments mémoriels de Groix et sur une plaque de l'Église St Sauveur à La Rochelle.
Plaque mémorielle de l'Église Saint Sauveur à La Rochelle (Charente Mme)
Le 14 mai 1915 le "Jupiter I" est réquisitionné à La Rochelle, aménagé en arraisonneur et affecté au Front de mer de la Gironde, en remplacement de l’éclaireur auxiliaire "Vauban". Il reçoit alors les deux appareils de dragage du Vauban, le poste de T.S.F. de l’ "Actif", ainsi qu’un canon de 47 mm.
Par la suite, il est affecté à la 6ème escadrille de patrouille à Boulogne (Pas de Calais) en tant que patrouilleur auxiliaire.
Ses missions sont la surveillance, la défense des eaux territoriales, l'escorte des dragueurs démineurs. Son équipage est constitué de 26 de marins, en principe commandé par un Lieutenant de Vaisseau, exceptionnellement absent le 10 juillet 1917.
Rapport de l’E.V. JONNESKINDT, commandant le dragueur LAÏTA, responsable de la mission du 10 juillet 1917 au commandant la 6ème escadrille
Le groupe de l’Ouest "Laïta" - "Saint Joachim" est sortie des jetées à 04h et a filé la drague à 500 m dans le Nord des jetées, cap sur la bouée n° 1 de façon à passer dans le Sud de cette bouée. Arrivé à hauteur de la bouée 1, venu sur la droite au N 65 W pour draguer la route des hôpitaux. Après avoir dragué 1,25 mille sur cette route, venu sur la gauche cap à l’Ouest de la bouée n°1 de façon à laisser un bateau dans le Nord et un dans le Sud de la bouée. Venu ensuite sur la gauche de façon à faire passer un dragueur dans le Nord et par l’Ouest de la bouée n° 6 et l’autre dans le Sud. Fait ensuite 1/2 mille à l’Est et rentré les dragues à 08h45, après la pleine mer, sans aucun incident de dragage.
Le rapport transmis au CV Chef de Division avec la mention suivante: « Monsieur Jonneskindt a exécuté exactement les ordres reçus et a fait tout ce qu’il pouvait faire pendant cette première partie du dragage de la journée. »
Rapport adressé au Ministre de la Marine sur les faits
Le " Jupiter I " a sombré sur une mine qui n’était pas mouillée sur la route en vigueur. Cette mine faisait partie d’un champ qui a été dragué le lendemain
dans un zone qui habituellement est draguée chaque jour, mais qui ne l’avait pas été dans la matinée du 10 Juillet parce que l’heure matinale de la marée n’avait permis le dragage qu’après la
haute mer. (Voir rapport Jonneskindt ci-dessus)
Le groupe "Lorientais" "Jupiter I " eût mieux fait de se tenir sur la route commerciale comme le prescrit mon ordre car le dragage d’une route est toujours plus sûr que le dragage zone. Ayant fait le dragage Est avant de prendre la patrouille Ouest, les deux bâtiments n’ont pas su que le dragage ouest habituel avait été incomplet. Il y a là un défaut de liaison dans l’ensemble des services de dragage et de patrouille.
Le "Lorientais" a très bien exécuté le sauvetage de l’équipage de "Jupiter I ". Sans doute, le commandant a exposé son bâtiment à la rencontre d’une autre mine qui l’eût évidemment détruit lui aussi, mais il y a là un cas de conscience si délicat que je ne puis finalement qu’approuver l’Enseigne BOUYGUE d’avoir obéi à l’entraînement de son caractère généreux et entreprenant.
Les ordres du chef d’escadrille exonèrent le L.V. BAYLE, commandant du "Jupiter I ", de toute responsabilité du fait de n’être pas à bord de son bâtiment, ni pour les dragages, ni pour la patrouille dans la matinée du 10 Juillet. Normalement, un chef de section doit patrouiller avec sa section et tel est le service dans la 4ème escadrille qui est aussi une escadrille de dragage. Mais l’importance numérique de la 6éme escadrille ne comporte pas qu’une section soit au repos comme dans la 4éme. Dans ces conditions, j’admets que les chefs de section de la 6ème ne prennent pas part au service de patrouille qui les empêcherait de s’occuper du matériel spécial de leur section avec le soin désirable. J’admets aussi que la présence de 2 chefs de section est superflue pour le dragage d’un même groupe et que nous devons épargner des fatigues inutiles à nos officiers spécialistes. J’admets dans le principe les ordres du Chef d’escadrille relatifs à ces deux points, mais je n’en approuve pas l’application car cela pourrait être appliqué d’une façon plus régulière qui respecte celui de la responsabilité personnelle du commandant d’un bâtiment.
Je ne pense pas qu’il soit bon et avantageux d’attribuer à l’un des chefs de section l’entraînement militaire de l’Escadrille et d’attribuer à l’autre la direction du service de dragage. L’entraînement d’une section appartient et incombe à son chef, et toute centralisation portant sur plusieurs sections appartient et incombe au chef d’escadrille. Il n’y a pas lieu de mélanger les responsabilités des chefs de section comme cela existe actuellement dans la 6ème escadrille.
En résumé, la perte du "Jupiter I " est due à un ensemble de faits qui ne mettent en cause que la responsabilité du chef d’escadrille pour une organisation de service courant défectueuse, qui peut et doit être améliorée.
J’appuie les propositions faites en faveur de l’Enseigne Bouygue et du QM Plumency et je les régularise.
extraits des monuments de Groix
PS : Seuls les corps des marins Paul CHUQUET, retrouvé le 2 août et inhumé à Calais, Auguste HOLLEY, retrouvé le 25 juillet et inhumé à Calais, Mathurin LE BOULICAUT, retrouvé le 1er août, et Eugène BOISSIÈRE, retrouvé le 31 juillet ont été retrouvé. Les sept autres ont disparus définitivement.